Logo Gallerie Terrades
Petit logo Gallerie Terrades

François, baron Gérard

Rome, 1770 – Paris, 1837

 

Les Parents de Psyché consultant l’oracle d’Apollon, vers 1796

 

Pierre noire, plume et encre brune, lavis brun

184 x 140 mm

 

Provenance

Atelier de l’artiste

Par descendance, collection particulière

 

 

Né à Rome de parents français, Gérard débute dans l’atelier du sculpteur Pajou puis fréquente celui de Brenet avant d’entrer chez David en 1786. En 1789, Girodet lui souffle le prix de Rome et Gérard, dont le père meurt l’année suivante, ne concourra plus. Il accompagne sa mère en Italie, où il séjourne de 1791 à 1793. A son retour, grâce à David, il obtient un atelier au Louvre et évite l’enrôlement dans les armées révolutionnaires. Son Bélisaire (1795) puis le portrait de son ami Isabey (1796) sont très remarqués au Salon, mais c’est surtout à Psyché recevant le premier baiser de l’Amour (1799) qu’il doit son grand succès. Il gagne ainsi la faveur du Premier consul qui lui commande un Ossian évoquant les fantômes au son de la harpe pour son château de Malmaison. Si sa renommée, établie par ses portraits des dignitaires de l’Empire, ne connaît pas d’éclipse, Gérard ne renonce pas pour autant à la peinture d’histoire. A La Bataille d’Austerlitz, succèdent des compositions à la gloire des Bourbons comme L’Entrée d’Henri IV à Paris (1817) et Le Couronnement de Charles X à Reims (1826). Sur le tard, renouant avec une inspiration anacréontique, il peint Daphnis et Chloé en 1824 et Hylas et la nymphe l’année suivante. Chevalier de la Légion d’honneur dès 1802, baron d’Empire, professeur à l’École des beaux-arts, membre de l’Institut, Gérard reçoit de Louis XVIII la croix de l’ordre de Saint-Michel et devient le premier peintre de Charles X.

 

Dès 1784, l’éditeur Pierre Didot (1761-1853) cherche une rupture complète avec la typographie et l’illustration en faveur au XVIIIe siècle. Dans son Epître sur les progrès de l’Imprimerie, il expose à l’Académie française son souci d’une « renaissance » de l’art typographique et du décor dans le sens d’une grande pureté et simplicité telle que Bodoni, son rival italien, les appliquait à l’imprimerie royale de Parme. Dix ans plus tard, après quelques essais, il publie une série de grands in-folio imprimés avec un nouveau caractère, le Didot, et illustrés par les plus grands peintres d’histoire de son temps - Fragonard, Prud’hon, Girodet et Gérard -, faisant entrer la peinture noble dans le livre et donnant à l’illustration une dignité nouvelle. Ce seront les éditions fameuses des Œuvres de Virgile et d’Horace (1798 et 1799), suivis par Les Amours pastorales de Daphnis et Chloé de Longus en 1800 et les Œuvres de Racine en 1801.

 

En 1797, Didot publie le premier de ses livres « nouveaux », Les Amours de Psyché et de Cupidon par Jean de La Fontaine. Dans ce texte édité pour la première fois en 1669, La Fontaine déploie un étonnant talent de prosateur, et détourne, en conjuguant galanterie et grivoiserie, un mythe célèbre depuis l'Antiquité, celui de la Belle et de la Bête. Cet ouvrage est illustré de cinq dessins de Gérard, gravés par Bénédicte-Alphonse Nicolet. Quatre de ces dessins sont exposés au Salon de 1796 mais, à l’exception du dessin Les Parents de Psyché consultent l’Oracle d’Apollon conservé au Getty Museum[1], ils sont actuellement perdus. Les parents de la belle Psyché, désespérés de l’absence de prétendant pour la jeune fille, viennent consulter l’oracle d’Apollon. Celui-ci annonce que Psyché est destinée à un « monstre cruel qui déchire les cœurs, […] se nourrit de soupirs, se baigne dans les pleurs […] ». Il s’agit en fait de l’Amour mais Psyché ne le saura que plus tard.

 

Dans la composition de Gérard, l’intensité dramatique liée à l’annonce par l’oracle de l’union maudite de la belle mortelle est à son comble. Psyché, désespérée, tombe dans les bras de sa mère qui lève les yeux vers la statue d’Apollon. Le père, à droite, porte un regard sévère sur sa fille tandis que Cupidon, en retrait à gauche, épie la scène. Notre feuille est la première pensée pour le dessin du Getty. Si la disposition générale de la composition est déjà trouvée, on peut noter de nombreuses différences dans les détails notamment dans l’architecture du temple. Exécuté avec des traits vifs de pierre noire, retravaillé à la plume et encre brune puis au lavis brun, notre dessin est bien représentatif de la manière de travailler de Gérard : une première idée très enlevée, puis, par la suite, probablement sur les suggestions de Didot qui souhaite pour ses ouvrages une rupture complète avec le XVIIIe siècle, un dessin d’une grande pureté.

 


[1] Plume et encre de Chine, encre brune, lavis d’encre de Chine et rehauts de gouache blanche sur pierre noire, 189 x 146 mm (inv. 92.GA.108). L’estampe correspondante de Nicolet a été publiée dans J. de La Fontaine, Les Amours de Psyché et de Cupidon, Paris, Didot, 1797, entre la page 24 et 25.



 
Retour