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Heinrich Friedrich Füger

Heilbronn, 1751 – Vienne, 1818

 

La Résurrection de Lazare, vers 1783

 

Plume et encre de Chine, lavis d’encre de Chine et lavis brun

338 x 294 mm

Filigrane : Fleur de lys dans un écu avec les initiales ICV

 

 

Fils d’un pasteur, Füger manifeste très tôt un talent certain pour la réalisation de portraits en miniature. Sa découverte des peintures d’histoire de Charles Le Brun, par le biais des estampes, semble avoir exercé une influence décisive sur sa carrière. A partir de 1764, il passe quatre ans à Ludwisbourg où il est l’élève du peintre de cour Nicolas Guibal. A la demande de son père, il entreprend ensuite des études de droit, à Halle, qu’il interrompt toutefois au bout de deux ans. Il reprend alors sa formation de peintre à Leipzig, essentiellement chez Adam Friedrich Oeser, un des principaux précurseurs du classicisme en Allemagne. Grâce à une bourse, il voyage à partir de 1776 ; après un séjour de quelques mois à Vienne, il se rend à Rome et à Naples. Grâce à ses relations à la cour impériale de Vienne, il obtient un grand nombre de commandes en Italie, non seulement de portraits en miniature, auxquels il n’a jamais cessé de se consacrer, mais aussi d’œuvres de grand format ; il exécute, par exemple, des peintures murales dans la bibliothèque du palais de Caserte commandées par la reine Marie-Caroline de Naples. En 1783, il regagne Vienne où il obtient de grands succès. Nommé directeur du département de sculpture et de peinture de l’Académie des Beaux-Arts en 1795, il deviendra ensuite, en 1806, directeur de la Galerie de peinture de l’Académie.

 

Le récit de la résurrection de Lazare (Jean, 11) cherche à montrer aux disciples la nécessité de croire en ce que « Jésus est la résurrection ; en ce que qui croit en lui, même s’il meurt, vit ; en ce que quiconque vit et croit en Jésus ne mourra jamais ». Ainsi le dessin que nous en donne Füger se veut aussi édifiant que ces quelques versets que nous paraphrasons. Et c’est afin d’être plus édifiant encore que Füger choisit de circonscrire l’énoncé de ce récit à son point d’acmé dramatique. Sa résurrection de Lazare se signale en effet par une composition des plus théâtrales. Füger choisit de représenter le moment précis où Jésus s’écrie : « Lazare, viens dehors ! » et où le mort se relève, sort du tombeau, les pieds et les mains liés de bandelettes, et le visage enveloppé d’un suaire. Autour de Jésus, dans la grotte que décrit Jean, se tiennent les spectateurs que mentionne le texte. Derrière le Christ, trois hommes symbolisent les apôtres, autour de la tombe d’autres spectateurs parmi lesquels les sœurs de Lazare, Marie et Marthe.

 

Les collections d’arts graphiques de la Staatsgalerie de Stuttgart conservent une autre version de la résurrection de Lazare par Füger, datée vers 1770-1772[1]. Une version où l’on retrouve, à l’avant plan gauche, cette même figure d’ignudo, à la différence près que celui de Stuttgart paraît comme terrassé de surprise car, si la pose est presque identique, son bras gauche levé et les doigts de cette même main écartés répondent bel et bien aux mains nues de Lazare s’extirpant hors de terre. On y retrouve également cette figure féminine, sur la gauche, penchée sur la tombe. Notre dessin cependant, tant du point de vue du traitement du sujet que de l’exécution, s’éloigne considérablement de la version de Stuttgart. Ici, Füger, en choisissant de placer sa feuille verticalement, opte pour une dynamique bien plus forte, réalisant une parfaite composition centripète, où la tombe de Lazare, au centre, semble exercer une réelle force de gravitation sur les divers protagonistes. Par ailleurs, la cassolette ornée d’une guirlande, apparaissant à l’arrière-plan droit de notre dessin, le style des drapés, l’épure de leurs lignes, tout semble indiquer un moment de la carrière de Füger plus tardif, quand il intègre les canons d’une esthétique pleinement néoclassique, soit autour de 1780. Nous rapprocherions ainsi notre dessin d’œuvres telles que l’Alceste et Admète  et de l’Hercule et Alceste de l’Albertina (1779), l’Exécution d’une vestale (collection particulière) ou la Vestale Tucia (Vienne, Wienmuseum), ces deux derniers datés de 1783[2].

 


[1] R. Keil, Heinrich Friedrich Füger, Nur weningen ist es vergönnt das Licht der Wahrheit zu sehen, Vienne, 2009, n°WV14, p. 198.

[2] Ibid., n°WV 96, 97, 114 et 115, p. 225 et 232.



 
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