Logo Gallerie Terrades
Petit logo Gallerie Terrades

Charles-François Hutin

Paris, 1715 – Dresde, 1776

 

Le Génie tutélaire de la France conduit le Dauphin au temple de l’Hymen, 1745

 

Pinceau et encre brune, gouache

512 x 350 mm

 

Provenance

marque de collection non identifiée en bas à droite

Pierre Franc Lamy (1855-1919), artiste

Vente de sa collection, Paris, Hôtel Drouot, 25 et 26 novembre 1912, n°123

Collection de M. de Kerveguen

Par descendance, collection particulière

 

 

Fils du graveur François Hutin, Charles-François étudie dans l’atelier de François Lemoyne et obtient, en 1735, le second prix de Rome avec sa Rébecca recevant d’Éliézer les présents que lui envoie Abraham. Après un séjour à Rome entre 1737 et 1743, il est reçu à l’Académie royale de peinture et de sculpture en 1747. Mais Hutin quitte définitivement la France un an plus tard avec son frère Pierre pour se mettre au service du roi Auguste III de Pologne à Dresde, sans doute grâce à la protection de son oncle Louis de Silvestre, jadis Premier peintre du roi. Il participe alors à la décoration des églises de Dresde (plafond de la chapelle de la Croix à la cathédrale) et des palais royaux. Le rôle prééminent qu’il joue dans la vie artistique de la cour de Saxe est attesté par sa nomination en 1764 comme directeur des Arts. Hutin tient une place non négligeable parmi les nombreux artisans du rayonnement de l’art français dans les cours étrangères au xviiie siècle.

 

Le 23 février 1745, le dauphin Louis de France, fils aîné de Louis XV, épouse à Versailles l’infante d’Espagne, Marie-Thérèse de Bourbon, fille de Philippe V et d’Elisabeth Farnèse. Ce mariage arrangé et très politique sera cependant une union heureuse. Mais Marie-Thérèse décède dès l’année suivante en donnant le jour à une petite fille qui ne vit que deux ans. Très affecté, le dauphin sera cependant contraint de se remarier en 1747 avec Marie-Josèphe de Saxe. A l’occasion des noces de 1745, de nombreuses fêtes sont données à Versailles mais également à Paris, les 23 et 25 février : le jour du mariage, des concerts et des festins sont donnés dans plusieurs salles couvertes dans la ville tandis qu’un grand bal masqué est donné dans la cour de l’Hôtel de ville deux jours plus tard. Pour garder le souvenir de ces évènements, la ville de Paris décide de publier un livre des Fêtes publiques données par la Ville de Paris à l’occasion du mariage de Monseigneur le Dauphin les 23 et 26 février MDCCXLV. De grand format (in-folio, environ 62,5 x 47 cm), cet ouvrage comprend 19 grandes planches gravées par les Cochin père et fils, le texte et un frontispice gravée par Jacques-Philippe Le Bas (1707-1783)[1].

 

En 1745, à peine rentré de Rome où l’a conduit son grand prix de 1735, Hutin vient d’être agréé à l’Académie royale de peinture et de sculpture. C’est lui à qui l’on confie le dessin de ce frontispice (fig. 1). Le jeune prince, figuré sous la figure d’un héros couronné de fleurs, marche vers le temple de l’Hymen conduit par le Génie de la France, reconnaissable à la tige de lys qu’il tient de la main droite. Le dieu Hymen, fils de Bacchus et de Vénus, présidant aux mariages, lui présente le portrait de l’infante. Sur la droite, deux génies portent les armes des époux. Au pied du temple, la Muse héroïque et le Destin lisent dans le Livre du temps les exploits futurs du prince. Divers petits amours, dans les airs ou jouant avec un lion, s’occupent à faire des couronnes et des guirlandes de fleurs pour la célébration de la fête.

 

Il existe plusieurs dessins de cette composition : une version à la pierre noire et craie blanche est conservée au Kupferstichkabinett du Kunstmuseum de Bâle[2] tandis qu’une aquarelle gouachée se trouve aujourd’hui dans la collection Horvitz[3]. Enfin, une version aquarellée, de moindre qualité et très probablement une copie, se trouve placée dans un exemplaire de luxe de l’ouvrage, entièrement aquarellé, conservé à la Bibliothèque nationale de France[4]. Notre version présente une différence importante par rapport à toutes ces feuilles : la figure du Dauphin est distincte. Ici, il paraît plus jeune – le prince n’a que seize ans au moment de son premier mariage – et n’est pas enveloppé dans le grand manteau que l’on retrouve dans les autres versions et sur l’estampe. Notre feuille pourrait dont être plutôt une première idée de composition destinée à la soumission au commanditaire qui aurait alors demandé d’accentuer la figure du jeune prince pour en faire un portrait plus martial.

 


[1] Eau-forte et burin, 507 x 345 mm (Inventaire du fonds français 28).

[2] Pierre noire et rehauts de blanc, 516 x 351 mm, inv. Bi.385.26.

[3] Plume et encre brune, lavis gris et brun, aquarelle et gouache sur préparation à la pierre noire, 503 x 346 mm (A. Clark éditeur, Traditions & Transitions, Eighteenth-Century French Art from the Horvitz Collection, Paris, Petit-Palais, 2017, n°64, p. 186-187 et 510-511).

[4] Réserve Dc 1 (C) folio.



 
Retour