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Giovanni David

Cabella Ligure, 1743 – Gênes, 1790

 

La Reine Artémise prostrée sur l’urne de son mari Mausole, vers 1780

 

Huile sur toile

80 x 62 cm

Annoté sur l’urne : MAV…

 

 

Né près de Gênes en 1749, Giovanni David bénéficie très jeune de la protection de la famille Durazzo, dont il deviendra le peintre attitré. C’est à leurs frais qu’il se rend à Rome en 1770 pour continuer sa formation auprès du peintre Domenico Corvi (1721-1803), directeur de l’Accademia del Nudo, institution publique offrant aux élèves la possibilité de dessiner d’après le modèle vivant. Après avoir obtenu un prix de dessin à l’Accademia de San Luca en 1775, David séjourne quelques temps à Naples puis à Venise avant de revenir s’installer à Gênes. Là, sous le patronage des Durazzo, il reçoit des commandes pour le Palais ducal (deux lunettes pour la Sala del Maggiore Consiglio) et pour les églises de la ville comme Santa Maria del Carmine, Santa Maria del Rifugio ou Santa Maria delle Vigne. Entre l’automne 1785 et l’automne 1786, David voyage en France, aux Pays-Bas et en Angleterre. De retour à Gênes, il exécute en janvier 1789 le catafalque pour les obsèques de Charles III d’Espagne dans l’église de San Lorenzo avant de disparaître brutalement de maladie l’année suivante.

 

S’ajoutant au petit corpus de ses œuvres, La Reine Artémise prostrée sur l’urne de son mari Mausole présente toutes les caractéristiques du talent bizarre de l’artiste. Fille d’Hécatomnos, roi de Carie, Artémise épouse son propre frère Mausole. D’après Pline l’ancien, très affectée par la mort de son mari, Artémise prend la décision d’ériger en son honneur un grand tombeau à Halicarnasse qui sera considéré plus tard comme l’une des sept merveilles du monde antique. Selon d’autres auteurs antiques comme Aulu-Gelle et Valère Maxime, Artémise aurait été si désespérée qu’elle aurait été jusqu’à mêler dans sa boisson les cendres de son défunt mari, afin de faire de son corps à elle le tombeau vivant de son frère et époux. On retrouve ici les différents éléments de cette légende : sur la gauche, le tombeau du roi Mausole ; sur la droite, sur un coussin, la couronne royale mais également la coupe qui va permettre à Artémise de boire les cendres. Enfin, au centre, la reine, le sein dénudé, entoure de ses bras l’urne de marbre vert contenant les restes de son mari. Dans une estampe gravée par Giovanni David, on retrouve la figure d’Artémise dans une position très comparable[1].

 

Durant ses années romaines, David est impressionné par l’imagination fertile du peintre Johann Heinrich Füssli, arrivé de Londres en 1770, initiateur d’un romantisme noir s’exprimant dans des sujets fantastiques ou macabres. Mais le jeune peintre ligurien est également sensible à l’art visionnaire du graveur et architecte Piranèse, dont les vertigineuses vues de la Rome antique ont eu une influence considérable sur le milieu cosmopolite romain de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Nous retrouvons toutes ces influences dans notre tableau : un éclairage étrange, une atmosphère sépulcrale, la présence oppressante de l’architecture et un sujet morbide. Il peut ainsi aisément être comparé avec d’autres œuvres de l’artiste comme le Tobit ensevelissant les morts du musée Fabre à Montpellier.

 


[1] M. Newcome Schleier et G. Grasso, Giovanni David pittore e incisore della famiglia Durazzo, Turin, 2003, n°145.



 
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